C’est peut-être la première opération spectaculaire du grand nettoyage promis par le ministre de l’Enseignement Supérieur à sa prise de fonction. Le président de l’université Hassan II Aïn Chock de Casablanca et son homologue de Kénitra (université Ibn Tofaïl) ont brusquement démissionné de leur fonction alors qu’ils étaient à peine à mi-mandat.
La décision a fait l’effet d’une bombe dans le milieu académique d’autant plus qu’elle a touché la plus grande université du pays par les effectifs. A Casablanca, la vacance de pouvoir n’a pas duré longtemps. L’actuel doyen de la faculté des sciences juridiques, sociales et économiques assure l’intérim en attendant la relance d’un processus de nomination d’un nouveau président.
Officiellement, les deux responsables seraient partis de leur propre gré. Mais peu de gens, y compris sur les campus et au ministère à Rabat, croient en cette version. La démission de hauts responsables de l’administration n’étant pas dans les mœurs marocaines. En réalité, confie une source au ministère, les deux présidents ont été sanctionnés par le ministre suite aux problèmes de gouvernance révélés par des rapports d’audit et d’inspection diligentés par l’administration centrale.
Au ministère de l’Enseignement Supérieur, l’on assure que les investigations vont toucher l’ensemble des universités. Dans la ligne de mire figure notamment celle de Mohammedia où la faculté de Droit cristallise des rumeurs sur des dysfonctionnements dans la gestion. C’est la première fois depuis la réforme du mode de nomination des responsables d’universités et d’établissements de l’enseignement supérieur -doyens des facs, présidents, directeurs d’écoles- qu’un mandat des présidents d’universités est interrompu par une mesure disciplinaire. C’est un signal qu’envoie le gouvernement sur sa volonté de lutter contre la mal gouvernance, quelle que soient les responsabilités.
Par ailleurs, le ministre de l’Enseignement supérieur n’a jamais caché sa volonté de «crever l’abcès» si besoin est. Il a toujours répété qu’il fallait s’intéresser à l’utilisation des fonds (plusieurs centaines de millions de dirhams reçus par chaque université) dégagés pour financer le fameux plan d’urgence de l’enseignement, concept lancé par son prédécesseur et dont il s’est toujours méfié. Conséquence de la loi sur l’autonomie de l’université, les présidents d’universités gèrent aujourd’hui d’importants budgets et ont la qualité d’ordonnateurs. Par les effectifs qu’ils gèrent, ce sont presque des PDG d’une grande entreprise et leurs émoluments équivalent à ceux d’un ministre. Pour le moment, l’onde de choc a été surtout ressentie au niveau de l’université de Casablanca. Celle-ci se classe au premier rang à l’échelle nationale de par le nombre des facultés, des disciplines enseignées et de l’effectif qu’elle reçoit.
Source : L'economiste